jeudi 6 septembre 2012

De l'annulation du Campus de l'Événement (2)


Serge Tapia,
président de l'AFO
Je devais donc intervenir lors du 1er Campus de l’Événement, organisé par la surprenante AFO (Association française des organisateurs d’événements). L’événement, qui aurait dû se dérouler les 11 et 12 septembre prochain, a été annulé. J’ai reçu, en guise d’information, un mail, signé par le Conseil d’administration de l’association (à lire ici), puis un appel téléphonique très cordiale de la chargée de coordination… Un peu court, malgré tout !

Tout d’abord, la curiosité qui m’anime, cultivée par 15 ans de journalisme, m’avait encouragé à proposer à l’AFO une intervention
lors de ce campus : « L’organisateur d’événements inspiré(s) » ou comment, l’observateur que je suis analyse la fonction d’organisateur et son évolution dans le temps. Je n’ai pas eu à insister pour faire partie du programme. Une simple discussion téléphonique avec la coordinatrice de l’association a suffi. Je m’attendais à être un peu plus dirigé, contraint, intégré dans une logique. Mais j’étais simplement ravi d’y participer, de voir enfin l’impact de l’AFO après un an d’existence, même si je percevais les limites de l’événement, comme de l’association.

L’AFO, dans son message de report, ne fait aucune autocritique. Pourtant, il me semble qu’elle a accumulé plusieurs erreurs méthodologiques :

-       une erreur de calendrier : les 18e Rencontres professionnelles Réunir se déroulent les 12 et 13 septembre et leurs dates étaient connues depuis 1 an. Il est évident que les organisateurs ont vite fait leur choix entre un rendez-vous installé et légitime et une première, aussi innovante soit-elle ;

-       une erreur de contenu : le campus n’avait pas de temps fort. Le thème, creux, « Au centre des préoccupations des organisateurs d’événements », n’avait pas grande signification… Le contenu n’était pas immédiatement perceptible, les conférenciers, aussi brillants soient-ils, peu connus. Pas de tête d’affiche, aucun témoignage concret d’organisateur ou de grande entreprise leader et mûre en matière de communication événementielle… ;

-       une erreur de stratégie : l’AFO n’a pas acquis la légitimité nécessaire pour organiser ce type de rencontre, payante de surcroît. L’AFO n’a pas prouvé qu’elle est un acteur incontournable du secteur. Depuis sa création, l’AFO n’a pas produit de contenu (hormis un brief type pour les traiteurs…), n’a pas posé une parole claire, n’a pas agi sur des thématiques métier ou marché, n’a pas fait preuve de beaucoup de transparence... En planifiant son campus, l'association a mis la charrue avec les boeufs. Une association comme l’ANAé (Association des agences de communication événementielle) a attendu plus de 12 ans avant d’organiser ses premières Universités d’été.

Au-delà de ses erreurs, dont on apprend toujours, il y a des questions qui concernent plus l’essence et la structure même de l’association :

-       Peut-on et doit-on fédérer TOUS les organisateurs ? Quel est le point commun entre un chef de projet junior de 25 ans en agence, un directeur de communication de 50 ans dans une entreprise du CAC 40 , un chargé d'événement chez un traiteur et un responsable de production free-lance ? Ils sont tous organisateurs certes, mais le lien entre eux est si ténu. Leurs expériences, leurs compétences, leurs attentes, leurs besoins, leurs objectifs… sont si différents ! La fonction d’organisateur est tellement diverse qu’elle me semble tout simplement impossible à fédérer !
En revanche, les organisateurs d’événements et de rencontres professionnelles en entreprises ont, quant à eux, une légitimité à se fédérer. Le CETA, le Club Événement et Tourisme d’Affaires en entreprise, possède un excellent positionnement, mais son développement est, pour plein de raisons, très lent. Les responsables projets, qui travaillent en agences ou en free pour des agences, auraient des raisons de s’unir. Mais ce n’est pas forcément dans la culture des 20-30 ans, qui en constituent la grande majorité.

-       La fonction d’organisateur a-t-elle besoin d’être défendue ? Admettons qu’on réponde positivement à la question précédente. Si la défense des organisateurs est un des objectifs de l’AFO, s’appuie-t-il alors sur une réalité ? Je n’ai, pour ma part, jamais entendu un organisateur demandé à être défendu… La nécessité de partager des expériences, des best practices, de bonnes idées, des prestataires efficaces, ça oui ! Je n’ai jamais senti non plus un manque de reconnaissance, du moins pour les décisionnaires en entreprise…

-       Serge Tapia est-il le meilleur profil pour présider aux destinées de l’AFO ?  Lorsqu’il était membre de l’ANAé, Serge Tapia dénotait, à coup sûr. Son aisance orale, son leadership, sa capacité de séduction, ses chemises et ses lunettes bariolées…, éprouvés au Club Med, ont toujours été en contradiction avec l’objectif des patrons d’agences événementielles qui cherchent à promouvoir une image de consultant très "Big Four" plutôt que de GO… Puis, après T Com T, la création d’Au Service de l’Événement a été jugée incompatible par l’ANAé avec son adhésion. Serge Tapia est comme son positionnement professionnel : atypique. Je ne suis pas convaincu que le profil d’un homme qui préside aux destinées d’une association, a fortiori en phase de lancement, peut se permettre de prêter à débat et de susciter des questions. Ce rôle doit revenir à une personne plus consensuelle, dont la trajectoire professionnelle et associative est sans aspérité et conforme à l’objet de la structure. 

-       N’y a-t-il pas une autre communication possible ? L’AFO évoque 300 adhérents et se fixe un objectif de 2000 à court terme… Peut-on y croire ? Comme patron du magazine L’Événementiel pendant 6 ans, entre 2000 et 2005, alors même que le titre avait déjà 10 ans d'existence et fait ses preuves en termes de contenus, j’ai pu apprécier l’énergie qu’il faut déployer pour identifier, convaincre, recruter et réunir les décisionnaires en événement. Les doutes sur les adhérents de l’AFO sont permis. Depuis un an, à chaque fois que je rencontre un organisateur, je lui pose la question de son adhésion. Au mieux, on me répond non, mais la plupart du temps, on me demande ce qu’est l’AFO… Je me pose d’autant plus de questions que l’association a décidé de ne pas communiquer sur ses membres. Toutes les associations professionnelles (comme DCF-Directeurs commerciaux de France, l’Adetem-Association nationale des professionnels du marketing…) mettent au moins en avant les adhérents qui s’impliquent, comme pour prouver leur représentativité. Qui sont la cinquantaine de personnes dont l’AFO dit qu’elles participent à son fonctionnement ? Sont-ils vraiment emblématiques de la fonction d’organisateur d’événements ?

Le mérite de l’AFO est de secouer les associations professionnelles du secteur qui, il faut le dire, ont sombré depuis quelques années dans une léthargie coupable. Mais son positionnement, son management et sa communication ne convainquent pas. L’annulation du Campus de l’Événement n’améliore pas l’image de l’AFO. Et cette manière de se considérer comme la victime d’un complot associant les agences, la presse et les salons du secteur est puérile et inconsistante. L’AFO a déjà besoin d’une remise en question profonde et, à titre personnel, je suis prêt à apporter ma pierre à l’édifice. Ce post en est un premier témoignage.
L’événement, et plus largement la rencontre professionnelle, a besoin d’être promu comme une solution à des problématiques managériales, de communication, commerciales, marketing, une solution à l’accompagnement au changement, une solution à de nouvelles formes relationnelles manager/managés… Il y a là, dans ce rôle de promoteur, une place à prendre et un leadership à assurer.

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